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mardi 1 décembre 2020

DIVERSITÉ. UN MODÈLE: L'ÉGLISE ^^ !

Diversité. Un modèle : l’Église ^^ !
0. Préambule: «Dieu existe» est mathématiquement juste
1. L'arche de Noé
2. Plusieurs demeures
3. Courage exemplaire
4. Ouverture à l'inédit
5. Conversions étonnantes
6. Des gens, des personnes
7. Les obscurantistes et la Lumière
 
Nous voici en temps de l'Avent. Je vous offre cet article spirituel pour partager mon espérance en temps de pandémie. 

Préambule. «Dieu existe» est mathématiquement juste

Dans son numéro d'août 2020, la revue Science et Vie a consacré un dossier passionnant de 20 pages sur le sujet. Christoph Benzmüller est philosophe et mathématicien. Il est aussi spécialiste de l’intelligence artificielle et chercheur à l’Université de Berlin. En juillet dernier, il a publié un article-choc qui démontrait que, contrairement à ce qui se dit souvent, l’énoncé «Dieu existe» est mathématiquement juste et parfaitement logique. Il n’était pas évident de parvenir à ce résultat! Des savants tentent depuis des siècles de confirmer ou d’infirmer cet énoncé au moyen des mathématiques. Le premier à avoir tenté le coup semble avoir été saint Anselme de Cantorbéry au XIe siècle pour qui la foi ne s’oppose en rien à la raison. Par la suite, la discussion s’est surtout faite par le raisonnement verbal. Mais des mathématiciens ont cherché à tester l’énoncé «Dieu existe» au moyen des mathématiques. Le génial Leibnitz (1646-1716) fut l’un de ceux-là. En fait, personne n’y était parvenu, y compris Kurt Godel (1906-1978) qui fut cependant celui s’étant le plus approché de la solution. Après de longs travaux, Christoph Benzmüller est enfin parvenu à la réponse, et elle est étonnante. Je rappelle qu’il s’agit de mathématiques de pointe passant par les outils informatiques. Son article est donc rédigé en langage mathématique, avec symboles et équations. C'est du costaud! L’article peut être téléchargé ici :
Cliquer dans News, Preprint, A (Simplified) Supreme Being Necessarily Exists
Ou:

Cette réponse est que l’énoncé «Dieu existe» est mathématiquement juste et parfaitement logique. Contre toute attente, l’énoncé «Dieu n’existe pas» s’est révélé irrationnel! Tout un renversement!

Un extrait de l'article de Christoph Benzmüller. C'est des maths, et c'est du costaud!
 
Personnellement, cela ne change rien à ma foi : je n’ai jamais voulu une preuve scientifique pour croire en Dieu. Mais l’article de M. Benzmüller apporte une petite arme d’autodéfense intellectuelle. À qui prétend que croire en Dieu est obscurantiste, contraire à la science, infantile et superstitieux, il est maintenant valide de répondre qu’au contraire, «Dieu existe» est un énoncé mathématiquement juste et parfaitement logique!
Mais attention! Le théorème de M. Benzmüller ne constitue pas une preuve expérimentale de l'existence de Dieu: on ne l'a pas vu ni touché, on n'a pas isolé et extrait un gramme de sa substance ni, pour reprendre une image, arraché un poil de sa barbe! La démonstration affirme cependant qu’il est logique de croire qu’il existe. C’est tout de même un grand pas. La démonstration ne dit pas qui est Dieu, et elle ne prend parti pour aucune religion ou spiritualité, quoiqu’elle pointe vers un Dieu assez proche des religions monothéistes. Elle ne dit pas que tout dogme de telle foi est logique. Elle ne dit pas que tous les actes posés au nom de la foi sont rationnels, et encore moins que le recours à la violence pour imposer telle foi est rationnel. Elle ne dit pas non plus que Dieu tout entier peut être connu par la seule raison.
La tradition chrétienne, notamment orientale, enseigne que Dieu est à la fois connaissable et inconnaissable. Ainsi, saint Grégoire de Naziance pouvait écrire : «Ô Toi, l’Au-delà de tout. De tous les êtres tu es la fin, tu es unique. Tu es chacun et tu n’es aucun. Tu n’es pas un être seul, Tu n’es pas l’ensemble. Tu as tous les noms, Comment t’appellerais-je?». Saint Jean répond : «Dieu est Amour». Et là, Dieu quitte le monde des mathématiques et du raisonnement. 
On me demande pourquoi je suis croyant, pourquoi je suis Chrétien et Catholique, pourquoi je suis pratiquant («Tu es pourtant intelligent!» m'a-t-on déjà dit!). Je ne cherche pas à savoir pourquoi. Je ne pense pas que le pourquoi soit important. Je suis ainsi, les choses sont ainsi, et c'est tout. Sans tomber dans l'ésotérisme, je dirais qu'une des raisons de ma présence à la messe le dimanche est que je sens participer à l'entretien d'une sorte de vibration bienfaisante pour toute l'humanité. Je pense aussi que l'estompement de cette vibration aurait des effets négatifs. C'est «l'effet papillon» des physiciens: un petit geste avec de grandes conséquences imprévisibles.  

Pour la suite de cet article, trois précisions:
1) Je suis parfaitement conscient des problèmes existant dans l'Église, notamment ses scandales sexuels avec abus d'enfants et de religieuses. Je ne cautionne ces abus en aucune manière: ce sont des crimes qui doivent être traités pour ce qu'ils sont. Quant aux abus de pouvoir commis par certains au cours des âges, je rappelle ces mots de saint Pierre: «Soyez les pasteurs et veillez sur le troupeau de Dieu; veillez sur lui non par contrainte mais de plein gré; non par cupidité mais par dévouement; non pas en commandant en maîtres, mais en devenant des modèles» (Première lettre)
2) Par «Église», je ne veux pas dire «Vatican». Le Vatican n'est pas l'Église: il en est le siège administratif au sens large de ce terme, mais il n'en est pas le «cœur spirituel». D'ailleurs, les Catholiques ne sont pas tenus à faire pèlerinage au Vatican durant leur vie. De plus, le Vatican reste un cas très particulier dans l'Église et peu représentatif de sa réalité. Par exemple, depuis des siècles, le Vatican est un univers où la présence des femmes est, disons, minimaliste, cela alors que dans la globalité de l'Église les femmes sont aussi sinon plus nombreuses que les hommes. 
3) Je le redirai: l'Église, ce sont des personnes, des vies. 
Cela posé, je plonge.

L’arche de Noé
L'arche de Noé, par Edward Hicks (1846)
Noé Niyigena est né au Rwanda le 4 mars 1989 dans une famille pauvre. Il dira : «En me créant, le Seigneur a usé d’originalité : en effet, je suis né sans bras». «C’était un enfant très courageux, il faisait tous comme les autres mais en se servant de ces pieds», témoignera son père biologique. À trois ans et demi, ses parents le confient à une famille de Belgique. C’est là qu’il grandira. En 2019, Noé est ordonné prêtre dans l’Église catholique, par l’archevêque Rémy Victor Vancottem en la Cathédrale Saint-Aubin. Oui oui, prêtre! Que l’Église est belle! Et divinement dérangeante. Car, des gens ont profité de l’occasion (encore une fois) pour semer le doute. J’ai lu ces questions dans lesquelles l’autrice, une dénommée SC qui se dit «très, très dubitative», souffle ses réponses : «Cette ordination est-elle valide? Je croyais qu'un homme ne pouvait être ordonné s'il avait ce genre de handicap?» - ah bon, et pourquoi pas? ; «Si ce prêtre était resté dans son pays, aurait-il été accepté au Séminaire? S'il s'était agi d'un Européen, aurait-il été accepté dans le Séminaire qui l'a accueilli?». N’en déplaise à SC, l’abbé Noé a bien évidemment été validement ordonné.
https://france-handicap-info.com/france/accessibilite-dependance-societe-emploi-economie/365-medias-et-audiovisuelle/5202-noe-niyigena-dieu-decide-l-histoire-d-un-parcours-extraordinaire-celui-d-un-pretre-belge-d-origine-rwandaise-handicape
 
L'abbé Charles-Michel de L'Épée (1712-1789)
L’Église a été et est toujours à l’avant-garde pour l’intégration des personnes handicapées. Quelques exemples entre mille. Dès le XIIe siècle, l'Église autorise le mariage des sourds et muets, qui peuvent donner leur consentement par signes. Au tout début du XVIIIe siècle, Marie-Louise Trichet et Louis-Marie Grignion de Monfort ont fondé, en l'hôpital de Poitiers, une communauté de jeunes filles handicapées, les Filles de la Sagesse: «Apprenant que ces «pauvres folles» communient tous les jours, la bonne société crie au scandale» (Collectif: Le livre des merveilles, Mame Plon, 1999; page 745).
Plus tard en ce XVIIIe siècle, l'abbé Charles-Michel de l'Épée fondait la première école publique et gratuite pour sourds-muets. Après avoir rencontré deux jeunes sourdes-muettes et apprit d'elles comment elles communiquaient, il a perfectionné la langue par signes. À partir de ce moment, il s'est dévoué tout entier à cette cause. Issu d'un milieu aisé et possédant une fortune personnelle, il lui a consacré tout son argent et est décédé pauvre. Ses disciples fonderont d'autres écoles. Au début du XIXe siècle, sous l'Empire, les héritiers des «Lumières» interdiront la langue des signes: c'est bien pour dire! Heureusement, cette interdiction est restée sans effet: un grand mouvement de libération était devenu irrépressible. En 1985, Soeur Line a fondé une communauté contemplative, les Petites Sœurs disciples de l'Agneau, dont la particularité est d'accueillir une majorité de religieuses trisomiques. 

Marie Trichet et de Monfort. Anonyme, XIXe siècle.
Lorsque je prie, lorsque je participe à la messe, je m’unis à l’abbé Noé.
Je vais vous choquer! Je suis fier de faire partie de l’institution la plus diversifiée qui soit au monde, l’Église catholique. «B'en voyons, Antoine!». Eh oui, aucune institution ne présente une telle diversité, à un tel niveau et à un tel nombre de personnes : diversité des âges et des caractères, des origines ethniques et nationales (sur tous les continents), des modes de vie (nomades comme sédentaires), des conditions sociales, des professions et occupations, des conditions de santé physique et mentale, des opinions politiques, etc. Tout n’y est pas parfait, il y a d’inévitables tensions occasionnelles, son histoire plurielle de 2000 ans n’est pas sans tache, mais le niveau de concorde est élevé pour une diversité aussi extrême. En vérité, l’Église est un modèle.
Évidemment, elle n’est ni une entreprise commerciale ni un parlement démocratique - sa logique est autre, Dieu merci! L’Église est une communauté de foi, de prière et de partage. Au fond, c’est probablement cela qui dérange en premier lieu : une foi vivante en ce monde. Cette diversité se vit donc d’une manière particulière qui n’est pas celle «du monde». Elle se vit comme saint Paul l’a bien décrite : «Vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ; il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus» (Lettre aux Galates)…. Ce qui reste un défi constant.
L’Église semble statique et pourtant, derrière cette apparence, se trouvent des gens en mouvement vers la présence qui est en eux. On ne change rien de l’Évangile, ni du cœur de l’Eucharistie, ni du corps de la foi – ce sont les moteurs; c’est la personne qui change.
L’Église semble rigide – et elle a quelques rigidités, mais l’Église est souple aussi. Plus souple que rigide. Sinon, il y a longtemps qu’elle ne serait plus là.
Si Noé vous étonne, voici à l’approche de Noël, un tout petit échantillon de cette diversité unique.

Plusieurs demeures
Saint Pierre, par Marco Zoppo, XVe s.
En 1977, il y a plus de 40 ans, eut lieu une grande messe au Vatican pour les 80 ans du Pape Paul VI. Pour la première fois depuis des siècles, les évêques d’Europe et d’Amérique du Nord se trouvaient en minorité par rapport à ceux des autres continents. L’Église se montrait telle qu’elle est dans sa nature profonde : universelle – le mot catholique vient du grec et signifie universel, et diversifiée. Il est faux de croire que le Catholicisme est «occidental» : le Christ lui-même était du Moyen Orient et saint Pierre, le premier Pape, était Juif… et marié.
Sait-on qu’au cours de l’histoire, il y a eu 3 Papes berbères, 5 Papes syriens, quelques Papes qui avaient été mariés avant de devenir prêtres, et que tous les Papes qui ont œuvré de 537 à 752 étaient Orientaux, à l’exception d’un seul? 
Diversité : dans l’Église catholique, il n’y a pas moins de 23 Églises orientales. «Ces Églises se caractérisent par le fait d'être en communion avec l'évêque de Rome (le Pape), dont elles reconnaissent la primauté, et d'utiliser les rites liturgiques orientaux. Elles sont définies dans la terminologie catholique comme étant des Églises autonomes ou « Églises de droit propre », au sens juridique sui iuris, et sont considérées comme étant pleinement l'Église catholique, au même titre que l'Église latine de rite latin».
Diversité dans les formes de la louange au Père : l’Église catholique reconnait de manière pleine et entière sept différents rites orientaux, les Rites copte, syriaque occidental, maronite, syriaque oriental, byzantin, arménien et guèze. Plus encore : ces Églises orientales conservent leurs orientations théologiques et leur discipline ecclésiale – plusieurs d’entre elles ordonnent des hommes mariés de manière parfaitement valide. Ces Églises forment de petites minorités dans l’Église catholique; mais justement, voilà des minorités pleinement accueillies. Des «minorités spirituelles», sans surprise puisque l’Église est une institution spirituelle! Voir:
https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/angers-49000/malek-chaieb-mari-pere-et-desormais-pretre-4713096
 
Mais la diversité catholique est plus grande encore. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, il y a une belle diversité même dans la branche dite latine de l’Église catholique - branche latine est plus exact que branche occidentale, car cette branche est présente en Afrique, en Asie, etc. Dans cette branche, le Rite romain est le plus répandu. La Messe de Vatican II (en langue du peuple) est la forme ordinaire du Rite romain. Mais la Messe dite tridentine (en latin avec le prêtre tourné vers l’autel, dos à l’assemblée) y est aussi reconnue en tant que «Rite extraordinaire». De plus, trois variantes du Rite romain sont reconnues et pratiquées : le Rite zaïrois (pour l’Afrique sub-saharienne), le Rite bénédictin (chez les moniales et moines appartenant à l’Ordre de Saint-Benoit), et le Rite dit d’Usage anglican (pour les Anglicans qui se sont unis à l’Église catholique). Mais outre le Rite romain et ses variantes, la branche romaine reconnait six autres rites : les Rites mozarabe (pratiqué en Espagne et au Portugal), ambrosien (en Italie), de Braga (Portugal), de même que les Rites dominicain, cartusien et cistercien dans les monastères de ces Ordres.
Tout cela illustre la parole de Jésus : «Il y a plusieurs demeures dans la maisons de mon Père».
Quand je prie et vais à la messe, je m’unis à tous ces gens qui célèbrent en d’autres rites dans la communion.

Courage exemplaire
Expo de photos de victimes des Khmers rouges
Au Cambodge, les Catholiques forment une toute petite minorité de moins de 1% de la population. Mais c’est miraculeux qu’elle y soit encore! Soutenu moralement par des «grands» intellectuels occidentaux, le régime communiste des Khmers rouges de Pol Pot dévasta le pays lors de son sinistre règne qui dura de 1975 à 1979. On estime à au moins 1.7 millions le nombre de ses victimes, soit au moins 20% de la population du pays. Un record de l’horreur qui ne fut toutefois que l’un des massacres de masse perpétrés par les communistes dans le monde en quelques petites décennies du XXe siècle : on estime entre 80 et 100 millions le nombre de victimes directes de cette idéologie «progressiste» - dire qu’il se trouve encore aujourd’hui des communistes qui pestent contre les «violences» de l’Église... Sous le «guide éclairé» Pol Pot, «la communauté catholique du Cambodge, très minoritaire, fut proportionnellement l'une des plus touchées parmi les groupes ethniques et religieux : le nombre de disparus est évalué à 48,6 %. Le décès en camp de travail de Mgr Joseph Chhmar Salas, vicaire apostolique de Phnom Penh avec d'autres prêtres cambodgiens en est un symbole fort (…). La cathédrale de Phnom Penh fut, avec la Banque nationale du Cambodge, le seul édifice à être totalement rasé par les Khmers rouges»
Il y a une suite qui est une manière de prolongement. En 1979, le Vietnam, lui aussi communiste, s’empare du Cambodge et y met en place un régime allié. «S’ensuit alors une période de guerre civile qui dura jusqu’à la fin des années 90. Dans cet intervalle, le pays vécut de 79 à 89 sous la férule des communistes vietnamiens qui interdirent également toute forme de religion. À leur chute, l’existence des Chrétiens dans l’État du Cambodge fut officiellement reconnue le 7 avril 1990». Sept jours plus tard, une messe était célébrée publiquement pour la première fois dans le pays depuis 15 ans. «C’était pour la vigile pascale et la date est restée comme le signe de la résurrection de l’Église au Cambodge. Le pays comptait alors 3 000 catholiques». En juillet 1995, le pays vit l’ordination du premier prêtre cambodgien depuis 22 ans. Comment diable l’Église avait-elle pu survivre dans de telles conditions?! Il semble que ce fut grâce à une femme, une femme âgée : «Pendant 15 ans, elle fut la seule catholique dans son village de Prek-Toal constitué de maisons construites sur des radeaux en bambou, situé à l’embouchure de la rivière qui coule de Battambang au lac Tonlé Sap. Il n’y avait pas de prêtre, il n’y avait pas de communauté chrétienne pour la soutenir. Mais chaque Noël, elle rassemblait ses voisins et ils célébraient la naissance de Jésus».
Aujourd’hui, l’Église catholique au Cambodge compte un peu plus de 20 000 fidèles. Quand je prie, quand je participe à l’Eucharistie, je m’associe avec cette dame, ces gens, ces pousses d’Église. Je m’unis à ces chrétiens persécutés encore aujourd’hui, comme ceux qui fuient le délire islamiste en Syrie, en Irak ou en certains pays africains, ou encore ceux de Palestine que l’État d’Israël fait tout pour chasser :
Je m'unis avec des gens courageux, comme la chrétienne pakistanaise Asia Bibi, dont l'incroyable épopée dit tout ce que peuvent subir des centaines de millions de Chrétiens de par le monde encore aujourd'hui. 
Il faut le savoir: «Les chrétiens constituent 80 % des personnes persécutées pour des motifs religieux, en faisant le groupe religieux le plus persécuté du monde. C’est à cette conclusion étonnante qu’arrive un groupe de recherche indépendant mis sur pied par le gouvernement britannique».
L'Église est un modèle de résilience. Lors du voyage du Pape François au Japon en novembre 2019, le premier ministre Shinzo Abe «rappelé la stupéfaction du missionnaire français, le Père Petitjean, quand ce dernier y découvrit en 1865 des communautés catholiques. Ces «chrétiens cachés ont maintenu leur foi vivante en l'absence de prêtre pendant plus de 220 ans» de persécutions (Voir Bertrand Blanchet, Prier la Parole, novembre-décembre 2020).

Ouverture à l’inédit

Augustus Tolton
En novembre 2020, le Pape François a fait Cardinal Wilton Gregory,  l'archevêque de Washington. Il est le premier Afro-américain nommé cardinal. Il a dit que l'Église marque ainsi son soutien envers les Afro-américains. En juin 2020, Mgr Gregory avait accusé le président Donald Trump d'instrumentaliser la foi chrétienne à des fins partisanes. https://www.lapresse.ca/international/etats-unis/2020-11-27/l-archeveque-de-washington-va-devenir-le-premier-cardinal-noir-americain.php

L'un des premiers prêtres catholiques afro-américains, sinon le premier, fut Augustus Tolton (1854-1897). Fils d'esclaves, sa voie ne fut pas facile et il dut affronter le racisme jusque dans les séminaires états-uniens. Ce fut grâce à l'aide constante des Franciscains qu'il put être ordonné au Vatican même. Le Père Tolton a été reconnu comme Vénérable, et il pourrait bientôt être reconnu comme Bienheureux, dernière étape avant la reconnaissance de sainteté par l'Église. https://fr.wikipedia.org/wiki/Augustus_Tolton

Alexandru Tudor est un jeune prêtre orthodoxe roumain lorsqu’il s’installe en Suisse avec son épouse. Il fonde une paroisse orthodoxe dont il devient le prêtre en 2004. En 2012, il contacte Monseigneur Charles Morerod, évêque de Fribourg-Lausanne-Genève qui connaît très bien le monde orthodoxe. De fil en aiguille, une idée audacieuse fera son chemin qui obtiendra le feu vert du Vatican : en 2016, Alexandru devient Catholique et obtient la permission de célébrer la messe selon le rite byzantin (oriental) aussi bien que romain. Il sera nommé curé d’une paroisse. «Comment réagissent ses paroissiens devant ce curé avec femme et enfant? «Il leur arrive d’être surpris, au début, ce qui me semble très normal. Ils me posent des questions sur le comment et le pourquoi. Je leur explique l’expérience qui est la mienne, et très franchement, je n’ai pas rencontré un seul prêtre ou laïc catholique qui m’ait dit clairement qu’il n’était pas d’accord.» De par son expérience personnelle autant que par la tradition orientale ininterrompue d’ordonner des hommes mariés, le Père Alexandru dit : «Le mariage est un sacrement. Mais l’amour que l’on porte à Dieu est aussi une forme de lien presque conjugal. Il peut servir de modèle, de force. Je ne crois pas du tout que ce soient des amours concurrents. Au contraire, ils se nourrissent.» La force du Père Alexandru est de ne rien revendiquer : «Je reste une exception. Je respecte infiniment le pape et sa mission qui est de conserver l’unité de l’Eglise, d’éviter les divisions. Je ne crois pas un instant que ce soit à moi de donner des leçons. Tout ce que je peux faire, c’est de prêcher modestement par mon exemple, de montrer que c’est possible».

Depuis ses débuts, l'Église ordonnait prêtres des hommes célibataire ou mariés. Le célibat n'était pas obligatoire. Cette optique est restée celle des Églises orientales, catholiques et orthodoxes. Ce n’est qu’au XIe siècle que l’Église catholique a imposé le célibat pour les prêtres des rites occidentaux. Mais ce fut en ce même XIe siècle que l’Église a été déchirée par le premier grand schisme, qui sépara les Églises d’Orient et d’Occident. Plusieurs facteurs avaient provoqué cette rupture qui couvait depuis longtemps et qui était stimulés par les rivalités politiques entre empires. Cette déchirure entraîna les Églises orientales, dites Orthodoxes, vers un fort sentiment national sinon nationaliste, et l’Église occidentale, dite Catholique, vers un idéalisme désincarné : l’imposition du célibat pour tous les prêtres permettait de se démarquer de l’Orient en donnant une impression trompeuse de plus grande pureté et de spiritualité plus élevée. Il s'agissait là d'un geste de rupture face à la Tradition. De même pour l’indissolubilité du mariage proclamée au XIIIe siècle (en Occident, le mariage comme sacrement date du XIIe siècle). Ce schisme a donc eu d’énormes répercussions! Pour ma part, je suis impatient de voir enfin réunies ces Églises dont la séparation me semble injustifiable aujourd’hui. Du côté catholique, la porte est ouverte : depuis le XVIIe siècle, une vingtaine d’Églises orientales se sont réconciliées avec l’Église catholique. Elles en font désormais parties intégrantes. Cela prouve que la théologie était pour bien peu dans le Schisme du XIe siècle. Quant à l’Église maronite, elle n’avait pas participé à ce Schisme et est toujours demeurée catholique, à nouveau avec sa propre liturgie et sa discipline. L’arrivée de nombreux Chrétiens d’Orient en Occident ces dernières années, fuyant le chaos et le délire criminel des islamistes, pourrait provoquer une nouvelle étape de rapprochement et de communion.

Conversions étonnantes
Brigitte Bédard / https://www.lavictoiredelamour.org/notre-equipe
 
Bisexualité flamboyante, consommation de drogues douces et dures, abus d’alcool, athéisme total… Ce n’est pas le profil catholique type. Pourtant, c’est celui de la Québécoise Brigitte Bédard. Du moins, «avant». Un long chemin de conversion, de pénitence, d’ajustement. Avec beaucoup de joie! «Convertissez-vous car le Royaume des cieux est tout proche», annonçait Jean Baptiste. Car Brigitte est toujours aussi extrovertie qu’avant. C’est la même personne, mais autrement. La foi ne demande pas de ne plus être soi. C’est peut-être plutôt le contraire : elle mène vers soi, dans la liberté intérieure et non sous la contrainte extérieure. Certains disent : «J’exige d’être accepté comme je suis!». Mais comment suis-je, qui suis-je, en vérité? Cette méchanceté en moi est-elle moi «tel que je suis»? Cette arrogante qui me fait exiger des autres qu'ils se plient à mes désirs est-elle moi «comme je suis», alors même que je n'ai aucune intention de me convertir? Certaines personnes sont parvenues à répondre rapidement à ces questions dans leur vie – y compris parmi les Catholiques, mais d’autres non qui sont passées par bien des sentiers tortueux, y compris à nouveau parmi les Catholiques. Mariée et mère de famille, Brigitte est journaliste indépendante. Depuis plus de cinq ans, elle collabore à l’émission La victoire de l’amour, ce qui représente pour elle plus de 200 chroniques et une centaine de commentaires homilétiques – ses homélies (eh oui, une femme qui fait des homélies) sont à la fois pétillantes, rafraîchissantes et profondes. Entre autres.
Vous pourriez être surpris de la présence de membres de minorités sexuelles en l’Église – position pas très confortable, mais pas intenable non plus. À Montréal, la paroisse Saint-Pierre-apôtre, située dans le «village arc-en-ciel», propose une pastorale adaptée à la communauté LGBT+, «une église ouverte. Notre accueil est inconditionnel pour tous et toutes». Oui oui, c'est catholique! Nous sommes tous et toutes enfants de Dieu. Tout cela n'est pas si surprenant car, dans l'univers protégé du Vatican et en dépit d'un discours officiel sur cette question, les homosexuels représenteraient jusqu'à 80% des gens y œuvrant, soit la plus grande concentration gay au monde (Frédéric Martel, Sodoma, édition revue et enrichie, Pocket, 2020; page 59). Le Vatican est en effet un cas très particulier, même dans l'Église.
 
Pour le rôle des femmes, il y a nettement place à amélioration, mais il est injuste d’affirmer que les femmes sont «invisibles» dans l’Église. Depuis les saintes Marie, Marie Madeleine, Marie Salomé et Priscille (collaboratrice de saint Paul) jusqu'à Asia Bibi, des femmes, humbles ou célèbres, ont fait l'Église, à l'égalité des hommes. Ma ville natale, Montréal, a été cofondée par une femme, Jeanne Mance qui fut aussi la première infirmière laïque du Canada - elle n'appartenait à aucune congrégation religieuse, et elle a été reconnue Vénérable par l'Église, la première marche vers la reconnaissance de la sainteté. 
Aujourd'hui, des femmes y exercent presque tous les ministères, et elles sont de plus en plus nombreuses dans des postes de haute responsabilité : juristes du droit canon, théologiennes, agentes de pastorale, membres de commissions, etc.
La prêtrise est la seule exception, très particulière, et qui ne devrait pas être considérée comme une affaire de «pouvoir». Il y a eu bien assez de ces discours valorisant le pouvoir : à nouveau, l’Église est une communauté de foi, pas une affaire de pouvoir.
Reste que le Pape François a appelé à une présence «plus incisive» des femmes dans l'Église. Avec raison. Je reparlerai des femmes en l'Église au mois d'avril.
 
Des gens, des personnes
Ce tout petit échantillon vous surprend? Vous n’avez encore rien vu! Les Chrétiens, incluant les Catholiques, comptent autour de 2.5 milliards de personne, ce qui représente la plus grande communauté spirituelle au monde. Selon les chiffres de l’Annuaire pontifical 2020, publiés mercredi 25 mars dernier, les Catholiques dans le monde sont 1,329 milliard et représentent 18 % de la population mondiale.  Contrairement aux préjugés, la croissance du nombre de Catholiques dans le monde est légèrement supérieure à celle de la population mondiale. Mais les chiffres n’ont pas grande importance en eux-mêmes. Par contre, ils annoncent l’immense diversité de cette communauté. Ils traduisent aussi le fait que, non, le Catholicisme n’est pas une spiritualité Blanche et Occidentale – elle est d’ailleurs née au Moyen Orient, pas en France ni au Canada!

Car voilà, l’Église, c’est d’abord et avant tout cela : des gens. Des vies, de très nombreuses vies, pas nécessairement toutes droites ni toutes «typiques». Une communauté de foi rassemblée autour du Christ, dans l’Esprit, pour rendre gloire au Père. Deux mille ans de personnes réunies dans une aventure spirituelle extraordinaire; deux mille ans d’expériences de toutes sortes dans les contextes sociaux, culturels et humains les plus divers. Dans une telle diversité et sur une aussi longue période, il y a bien sûr des nuages. C’est inévitable : il y a déjà des nuages dans la vie de toute personne, alors imaginez… Mais on apprend aussi de nos erreurs : c’est l’expérience du fait de vivre. L’Église est un pèlerinage plutôt qu’un lieu fixé. Mais au-delà de quelques faux pas, il y a là bien davantage de beauté.

Avant la croix, le symbole des Chrétiens fut le poisson - Ictus, en grec: les lettres de ce mot donnent la première lettre des mots se traduisant par «Jésus Christ, Fils de Dieu, sauveur»

Quand je célèbre la messe, je m’unis à toutes ces personnes. Plus encore : je m’unis au cosmos, comme dans le Psaume 148 :

Alléluia ! Louez le Seigneur du haut des cieux, louez-le dans les hauteurs.
Vous, tous ses anges, louez-le, louez-le, tous les univers.
Louez-le, soleil et lune, louez-le, tous les astres de lumière ;
vous, cieux des cieux, louez-le, et les eaux des hauteurs des cieux.
Louez le Seigneur depuis la terre, monstres marins, tous les abîmes ;
feu et grêle, neige et brouillard, vent d'ouragan qui accomplis sa parole ; les arbres des vergers, tous les cèdres ;
Les montagnes et toutes les collines,
les bêtes sauvages et tous les troupeaux, le reptile et l'oiseau qui vole ;
Qu'ils louent le nom du Seigneur, le seul au-dessus de tout nom ; sur le ciel et sur la terre, sa splendeur : Alléluia !

Les obscurantistes et la Lumière
Lorsqu’il est question de l’Église catholique, les critiques fusent aussitôt. À tel point qu’il est à se demander si le dialogue est possible. En fait, souvent il ne l’est pas, et d’autant plus que bon nombre de ces critiques reposent sur des préjugés, de l’ignorance et de la mauvaise foi.
Le «Prieuré de Sion» est une fraude créée dans les années 1950!
Un seul exemple. L’Église est soupçonnée de «cacher» des choses, notamment des «vérités» au sujet de Jésus. Ces «secrets» seraient transmis contre la volonté répressive de l’Église par d’obscurs groupes héroïques. Un de ces groupes a acquis une sorte de célébrité au cours des dernières années : le Prieuré de Sion. Plusieurs livres y ont été consacrés, des romans mais aussi des essais aux prétentions scientifiques. Il est vrai que cette organisation a existé, sauf qu’il s’agit entièrement de l’œuvre de faussaires! Ce Prieuré a été forgé en France en 1956, par un dénommé Pierre Plantard. «Dans une série de documents tapés à la machine à écrire et déposés à la Bibliothèque nationale au milieu des années 1960, intitulés Dossiers secrets d'Henri Lobineau, Pierre Plantard  présente le Prieuré comme une confrérie remontant à 1099, liée à l'ordre du Temple en France. De nombreux universitaires et spécialistes ont démontré l’inauthenticité de ces documents, des faux confectionnés avec le concours de Philippe de Chérisey, le complice de Plantard»
Évidemment, la liste des «grands maîtres» de cet ordre (qui inclut Leonard de Vinci!) est une invention totale. Mais bien des gens se régalent de toutes sortes de «théories du complot», surtout quand il s’agit de l’Église, et ils continuent à les propager malgré l’énormité de la tromperie. Je ne serais guère surpris que le fonds de commerce de monsieur Plantard ait été repris par d’autres manipulateurs.
En réalité, aucune de ces supposées «vérités» cachées par l’Église n’a le moindre fondement. Il n’existe aucun ésotérisme dans la foi chrétienne : elle est toute exotérique. Les mystères de la foi comme, par exemple, la conception virginale du Christ ou la sainte Trinité, peuvent être difficiles à saisir par la seule raison, mais ils n’ont jamais été cachés. Au contraire, ils ont toujours été fermement affirmés et publiquement. Aucune cachette, aucune dissimulation. Les mystères de la foi chrétienne sont lumière et non occultes; ils sont professés à la lumière du jour, jamais au sein de cénacles d’initiés et de purs les protégeant jalousement au commun des mortels. Au point que certains les jugent (trop vite) superficiels…
Saint Irénée: «La gloire de Dieu, c'est l'Homme vivant»
Dès les années 40-50, saint Paul prévoyait que des gens allaient trahir l’Évangile au profit de «récits mythologiques» (Deuxième lettre à Timothée). En effet, des amateurs de mystères initiatiques ont tenté à de nombreuses reprises au cours des siècles de créer un «ésotérisme chrétien». Cette tentation sera toujours fermement rejetée par l’Église et toujours pour la même raison : il n’y a aucun ésotérisme dans l’Évangile de Jésus. Aucun. Mais les ténèbres exercent plus d’attrait que la Lumière sur certains esprits. À la fin du IIe siècle, saint Irénée de Lyon (c.130 – 202), évêque des Gaules, écrit son traité magistral Contre les hérésies – où sont déjà reconnus les quatre récits évangéliques devenus canoniques. Son message est clair : Amour et Lumière, l’Évangile et la personne de Jésus sont incompatibles avec toute gnose, tout ésotérisme. On dira : «Voilà l’Église répressive!». Eh bien, non, tout au contraire. Au moment où saint Irénée œuvre, les Chrétiens subissent une forte répression. En 177, à Lyon même (alors Lugdunum), une quarantaine de Chrétiens sont torturés et exécutés par l’administration romaine. En 202, Irénée subira le même sort. Le traité de saint Irénée est une affirmation positive de la foi en temps héroïque.  

L’obscurantisme n’est donc pas le fait de l’Église : il est en réalité le fait de sectaires, de gnostiques, de faussaires et de complotistes!
Donc, lorsqu’il est question de l’Église, il semble falloir consacrer beaucoup d’énergie pour simplement remettre les choses en perspective, sur ce sujet et sur plusieurs autres. Les Catholiques «ordinaires» ne sont pas tous armés en connaissances et en aisance argumentaire pour savoir comment se défendre avec justesse et précision. Beaucoup d’énergie et on n’a même pas pu aborder ce qu’est l’Église, ni ce que porte l’Évangile! 
Un bon manuel d’auto-défense catholique serait très utile!

Sources des illustrations:
Wikipédia (Domaine public, PD-US), sites institutionnels mentionnés.