PARTITION GRATUITE EN PDF: RIVAGES, POUR CLARINETTE SOLO
Ce
mois-ci, je vous offre GRATUITEMENT la partition manuscrite de Rivages (opus 49) pour clarinette seule.
Cette partition est offerte pour usage privé. Pour toute performance en concert, seule la partition éditée est autorisée, et seul le Centre de musique canadienne est autorisé à la copier, la louer et la vendre.
This sheet music is offered for private use. For any concert performance, only the edited sheet music is authorized, and only the Canadian Music Centre is authorized to copy, rent and sell it.
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Cette musique est / This music is: © Antoine Ouellette SOCAN
RIVAGES,
pour clarinette seule (opus 49; 2016)
J’ai écrit
de la musique de chambre, des pièces orchestrales et des motets pour chœurs.
Mais bon nombre de mes pièces ne font appel qu’à un seul instrument. Ce n’est
rien de nouveau en soi en ce qui concerne des instruments comme le piano,
l’orgue et la harpe auxquels j’ai consacré des œuvres. C’est un peu moins
fréquent pour le violoncelle pour lequel j’ai composé deux pièces solistes (Solitudes et Psaume), mais il existe un répertoire solo relativement consistant
pour lui. Cependant, j’ai écrit une série de sept pièces (à date) pour un
instrument à vent seul, ce qui est moins habituel. Ce sont, par ordre
d’opus :
Bourrasque, pour flûte
Odyssée, pour saxophone alto
Musique sous les étoiles, pour basson
Bouleau jaune, pour trompette
Auberivière, pour flûte
Dent-de-lion, pour hautbois.
Aller à l'essentiel
Au début
janvier 2016, s’est ajoutée Rivages,
pour clarinette. Toutes ces pièces sont comme des fleurs de solitude. Je crois aussi
qu’il s’agit d’une conséquence de mon amour pour le chant grégorien qui est,
lui aussi, une musique purement mélodique.
Écrire pour
un instrument mélodique seul représente un défi. Contrairement
aux apparences, ce n’est pas plus facile que d’écrire pour un grand orchestre.
Pourquoi? Parce que tout est exposé à nu. Parce que l’intérêt doit être
maintenu toute la durée de la pièce sans les couleurs variées d’un orchestre.
On pourrait voir cela comme de l’ascèse : se concentrer sur l’essentiel,
sans artifice.
Coucher de soleil sur le traversier. Juillet 2016. |
À Sorel, je vis entouré d'eau. Il y a le Fleuve Saint-Laurent qui devient le Lac Saint-Pierre, les Rivières Richelieu et Yamaska (malheureusement très souillées par la pollution). De temps en temps, je prends le traversier (ferryboat,
pour mes amiEs de France!) qui part du quai situé à l'extrémité de ma
rue pour se rendre de l'autre côté, à Saint-Ignace-de-Loyola. Peut-être
est-ce cette situation géographique qui m'a inspiré Rivages. Ironie du sort: Rivages sera créée en décembre prochain sur l'autre rive... de l'Atlantique, en France. Mais cette inspiration n'est pas que de nature impressionniste. Je crois que la forme de la pièce s'en ressent elle-même puisque les deux brèves mélodies que j'utilise peuvent être entendues comme les deux rives d'un cours d'eau.
Ces deux motifs dialoguent ensemble tout au long de la pièce, et ce
dialogue est mis en évidence en recourant à deux registres différents de la
clarinette, soit son grave velouté pour le premier motif, et le médium-aigu
plus incisif pour le second. Les voici :Début de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Il faut
noter que la clarinette est un instrument transpositeur qui sonne un ton plus
bas que les notes écrites. Sur la partition, les premières notes écrites (mi,
sol, si) sonneront donc ré, fa, la. La pièce serait-elle en ré mineur? Le
premier motif semble l’être, mais le second tourne plutôt autour de mi, et la
pièce se termine sur un sol (la écrit). Rivages
n’est pas tonale : elle est modale, comme à peu près toute ma musique
d’ailleurs; modale au sens du chant grégorien ou d’autres musiques modales
comme les Ragas de l’Inde. J’ajoute «radicalement modale», parce qu’elle ne
contient aucun chromatisme ni transpositions, donc aucune note altérée par
rapport à la modalité établie dès le départ avec les deux motifs. «Se
concentrer sur l’essentiel», écrivais-je… Ce serait une erreur que de jouer Rivages en cherchant des harmonies
implicites : l’harmonie, au sens tonal (avec ses fonctions de tonique,
dominante, sous-dominante, etc.), lui est étrangère.
Le monde de Rivages
La Baie de Lavallière, Sainte-Anne-de-Sorel |
Section
1 : page 1, les trois premières portées et la première mesure de la
quatrième portée. Le motif A ondule sur un rythme ternaire simple, avec une
durée décroissante à chacune de ses quatre apparitions. Le motif B lui répond
de manière contemplative, d’abord sur deux notes seulement (mi et fa dièse
écrits), puis en ajoutant une troisième note, la. Les phrases du second motif
se terminent en échos et / ou en une note prolongée, qui mènent vers le silence
(sauf la troisième phrase).
Section
2 : les deux dernières lignes de la page 1 et les deux premières de la
page 2. Le motif A ondule à nouveau paisiblement et en phrases de durée
décroissante, mais sur un rythme différent (4 notes par temps, au lieu de 3).
Le motif B cherche à se déployer davantage : il va chercher la note ré, et
la note la revient plus souvent. La dernière phrase de ce motif conclut la
section en un écho qui se dissipe dans le silence.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
3 : lignes 3 et 4 (Page 2) et les deux premières mesures de la ligne 5. Le
motif A ondule sur un rythme nouveau, plus délié. La durée de ses quatre
phrases procède autrement : elles comptent respectivement 4, 2, 4 et 2
temps. Le motif B se déploie un peu plus encore, allant chercher la note do
dièse et de brefs mélismes en doubles-croches.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
4 : Les deux dernières mesures de la ligne 5 et la ligne 6 de la page 2,
de même que la ligne 1 de la page 3 et la première mesure de la ligne 2. Le
motif A se déploie par vagues du grave vers l’aigu, puis en une grande montée
rapide sur tout ce registre. Quelques notes aigües sont tenues, la dernière en
se dissolvant dans le silence.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
5 : en page 3, le reste de la ligne 2, les lignes 3 et 4, les deux
premières mesures de la ligne 5. Le motif A ondule sur un nouveau rythme, plus
délié encore que dans la section précédente. Ses phrases successives sont
cependant à nouveau décroissantes. Le motif B n’intègre plus de nouvelles
notes : il est parvenu à sa maturité. Mais chacune de ses phrases s’appuie
sur un mi grave. La section se termine par un retour du motif A.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
6 : 2e mesure de la ligne 5 et la ligne 6 de la page 3, de même
que la première ligne de la page 4. Comme le motif A occupait toute la section
4, cette section 6 est occupée par le seul motif B, toujours bien déployé et
avec les appuis sur le mi grave; mais des appogiatures simples s’ajoutent, de
même que des groupes rapides (et chaque fois contenant une note de plus) qui
amorcent chacune de ses phrases. La section se termine avec quatre notes
ascendantes plus longues et marquées.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
7 : lignes 2 à 4 de la page 4. Variante plus volubile de la section 4, sur
le motif A. La grande montée conclusive demeure cependant piano, plutôt que
crescendo.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
8 : ligne 5 de la page 4. Deux mesures seulement, où ondule le motif A en
valeurs égales et plus rapides.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
9 : dernière ligne de la page 4, les deux premières lignes de la page 5 de
même que la première mesure de la ligne 3. C’est le grand déploiement du motif
B avec davantage d’appogiatures. Ses phrases mettent en dialogue trois
registres bien distincts de la clarinette – on entend comme trois clarinettes
qui se répondent. La dernière mesure montre une irrégularité rythmique,
soulignée par les appuis sur chaque note.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
10 : le reste de la page 5. Le motif A se fait mordant et incisif, lui
aussi dans des registres contrastants de l’instrument. Le motif B lui réplique
sur deux notes seulement (mi et fa dièse), mais un la éclatant et joué à pleine
force termine la section : il s’agit de la note la plus forte de toute la
pièce : son sommet.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
11 : la première ligne de la page 6. Tout au contraire, cette section est
faite de notes longues jouée très doucement : les notes les plus délicates
de la pièce.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
12 : page 6, ligne 2 et les deux premières mesures de la ligne 3. Le motif
A ondule vivement (avec les valeurs rythmiques les plus brèves de la
pièce : des triples-croches), mais doucement, avant de s’éteindre dans le
silence.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
13 : en page 6, la dernière mesure de la ligne 3, les lignes 4 et 5, puis
la première mesure de la ligne 6. Seul le motif B est présent, déployé avec
sérénité et assurance. Il conquiert même deux nouveaux sons vers l’aigu :
le si et le do dièse, avant de se reposer avec une vocalise descendante.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Section
14 : le reste de la page 6 et la page 7. Ici revient l’alternance plus
rapide des motifs A et B, un peu comme au début de la pièce. À chacune de ses
phrases, le motif A prend un rythme différent, et ces rythmes récapitulent des
aspects qu’il a pris au fil de la pièce. Le motif B retrouve le caractère plus
allusif qu’il avait au début de la pièce; il fait entendre quelques échos. Sa
note la, discrète au début de la pièce, revient plus souvent maintenant, et
cette note «magique» conclut la pièce – dans la tranquillité, mais aussi de
manière suspendue comme si cette note et le motif B désirait poursuivre sa vie
à l’intérieur de qui écoute la pièce.
Extrait de Rivages. (C) 2016 Antoine Ouellette SOCAN |
Rivages utilise donc à sa manière le principe de
répétition : elle l’utilise pour faire naître des mutations dans ses deux
courtes mélodies constitutives. Ces mutations donnent chaque fois de nouvelles
perspectives, de nouveau point de vue sur les deux motifs. Comme un objet que
l’on examine sous plusieurs angles, sous des lumières différentes. Comme les
vagues qui arrivent sur une rive et qui ne sont jamais identiques les unes des
autres; des vagues qui modifient ce rivage et font scintiller la surface de
l’eau d’une manière sans cesse renouvelée.
SOURCES DES IMAGES: COLLECTION PERSONNELLE.
SOURCES DES IMAGES: COLLECTION PERSONNELLE.