(bouchons nos oreilles!)
1. La difficile équité
2. Super Oiseau
3. L'intelligence des oiseaux
4. Les émotions des oiseaux
5. Frankenscience!
6. Cris et chants: quels oiseaux chantent?
Giotto: St François d'Assise prêchant aux oiseaux |
Pour moi, les Oiseaux ne font pas que symboliser la Transcendance: ils participent de la Transcendance. Ce n'est donc pas que par hasard que les Oiseaux sont présents dans la Bible, ainsi que dans les textes sacrés d'autres traditions spirituelles. Comme dans le livre du prophète Ézékiel (chapitre 17):
Ainsi parle le Seigneur Dieu :
« À la cime du grand cèdre,
je prendrai une tige ;
au sommet de sa ramure,
j’en cueillerai une toute jeune,
et je la planterai moi-même
sur une montagne très élevée.
Sur la haute montagne d’Israël
je la planterai.
Elle portera des rameaux, et produira du fruit,
elle deviendra un cèdre magnifique.
En dessous d’elle habiteront tous les passereaux
et toutes sortes d’oiseaux,
à l’ombre de ses branches ils habiteront».
Reconnaissance de la transcendance: j'écris Oiseaux et non oiseaux. Et en accord avec une tradition en ornithologie, je mets une majuscule au début du nom de chaque espèce: Tourterelle, Albatros, Pie, Grive, etc.
La difficile équité
La difficile équité
En studio,
nous étions plusieurs : deux personnes venus commenter des «textes de la
semaine», Aurélie Lanctot et Guillaume Lavallée, deux auteurs, Simon Boulerice
et Michel Tremblay, le duo Luc-Alain Giraldeau et moi-même pour
commenter le livre de Monsieur Strycker, et l’animatrice. C’était du direct,
alors on ne sait pas trop ce qui va et peut se passer! Comme je suis un drôle
d’oiseau (à ce qu’on m’a déjà dit, parce que moi je ne sais pas trop), j’ai
observé ce qui se passait pendant que les autres présentaient leur chronique. Messieurs
Boulerice et Tremblay, eux-mêmes membres de la communauté gay, commentaient un
roman scandinave mettant en vedette deux gays, roman évidemment «grand»,
«profondément humain» et «universel». À un moment, mon intérêt a été saisi.
L’un des personnages du roman est aussi Témoin de Jéhovah, et les deux invités
ont émis quelques commentaires divertissants à l’endroit
des Témoins de Jéhovah – je précise ne pas l’être. L’un d’eux, je ne me
souviens pas qui, a souligné la «folie psychologique» des Témoins. Cela peut se
discuter. Mais j’étais étonné : voilà deux hommes membres d’une communauté
minoritaire qui utilisent un vocabulaire peu amène face à une autre communauté
minoritaire. Je me suis dit (sans oser le dire au micro, zut) qu’ils n’auraient peut-être
pas apprécié qu’un Témoin de Jéhovah dise sur les ondes de la radio publique
nationale la même chose face à leur communauté, genre : «Les gays sont
atteints de folie psychologique». Je me suis aussi dit que voilà des gens qui
s’accordent à eux-mêmes des droits de varloper autrui publiquement qu’ils
n’accorderaient pas à autrui vis-à-vis eux. Un peu d’équité, Messieurs! L’un
des deux a aussi dit, à quelques mots près, que «Dieu, on n’en veut plus!». On étant nous, j’étais fort déçu qu’ils se permettent de parler en mon nom,
en prenant pour acquis que je devais assurément partager leur noble et
progressiste point de vue – mais non! Petit détail qui m’a amusé, j’ai remarqué
qu’une personne présente en ce studio portait un signe religieux, discret mais
tout de même visible… Hum, que diraient donc les oiseaux de nous?
Un autre livre sur le sujet, paru en 2017 |
Après
cela, ce fut à mon tour, ou plutôt à notre tour. Je n'avais pas compris, mais
il y avait un autre invité pour discuter du même livre - un monsieur qui a enseigné l'éthologie à l'université et
qui est aujourd'hui cadre dans une institution. Quand je suis arrivé, la
recherchiste m'a dit que nos commentaires respectifs sur nos fiches de lecture
se rejoignaient. Mon compère lui-même m'a dit avant l'entretien tout le mal
qu'il pensait du livre - il l'a en fait beaucoup moins aimé que moi. Là, je me
suis dit que cela risquait d'être trop critique, alors que c'est un livre quand
même bien écrit et très intéressant. Donc en quelques petites minutes, j'ai
repensé mon affaire et j'ai décidé de mettre l'accent sur les aspects positifs
du livre... Esprit de contradiction? Mais non, c'était plutôt histoire de
rendre justice au livre, un souci d'équilibre... En ondes, mon compère a eu la parole en premier et,
après une courte phrase où il a admis que le livre était intéressant, il a mis
cartes sur table: «un livre dangereux», des «comparaisons simplistes»,
«l'humain est beaucoup plus complexe que les oiseaux», etc. Ce genre de
critiques peut déborder en une sorte d'attaque contre les oiseaux, comme si
admirer les oiseaux pouvait porter ombrage à la «dignité humaine».
Quand ce fut mon tour, j'ai dit que le livre apporte un «retour du balancier»: après avoir longtemps nié que les oiseaux pouvaient être intelligents, nous découvrons peu à peu qu'ils le sont, à leur manière, et que le livre montre qu'ils possèdent même certaines capacités qui surpassent les nôtres. Réalise-t-on que déjà le seul fait de voler, donc de se déplacer rapidement, oblige les oiseaux à prendre des décisions rapidement, sur base quotidienne, chose qu’ils font avec une facilité déconcertante? Au-delà de cela, le livre contribue à modifier notre regard sur les oiseaux, à nous inciter à un plus grand respect vis-à-vis eux.
J'ai cité
un extrait de l'intro où l'auteur résume sa position; j'ai mentionné que la
science reconnait maintenant une forte intelligence à deux groupes d'oiseaux
(Perroquets et Corvidés: Corbeaux, Corneilles, Geais, Pies...), et que trois autres groupes sont «candidats» au même
titre. Hors d'ondes, mon ami a dit que l'auteur n'était pas un
scientifique mais juste un «observateur d'oiseaux», hum. Quand je ramassais mes
affaires ensuite, avant de quitter, les gens de l'équipe technique m'ont dit
que j'avais vraiment bien parlé du livre, que j'avais dit ce qu'on y trouvait,
et qu'ils allaient le lire! Je suis parti tout joyeux en chantonnant!
Super Oiseau
Un bel invité dans votre cour... |
Le
livre contient une introduction, treize chapitres, deux pages de remerciements,
l’index des espèces d’oiseaux mentionnées, une liste d’ouvrages «pour aller
plus loin»… mais pas de chapitre de conclusion. Les chapitres sont regroupés en
trois sections intitulées : Physiologie, Personnalité, Intelligence.
Chaque chapitre est consacré à un oiseau, espèce ou groupe, et vise à mettre en
lumière les capacités rares de ces oiseaux. Le style est vivant,
et l’auteur démontre un vrai don de conteur. C’est écrit à la manière
états-unienne avec plein d’anecdotes qui font avancer le propos avec légèreté.
On apprend beaucoup de choses, sur les oiseaux, mais encore sur l’histoire des
sciences naturelles, peut-être aussi un peu sur l’être humain.
Colibris, par John Gould, c. 1860 |
Trois questions sont lancées dès le début : Que se passerait-il si les oiseaux nous étudiaient? Quels caractères humains capteraient leur intérêt? Comment s’y prendraient-ils pour tirer des conclusions? J’aurais donc aimé que l’auteur joue le jeu de se mette dans la peau d’un oiseau. Mais il ne le fait pas vraiment et, au fond, le livre est plutôt : Ce que les humains pourraient dire d’eux-mêmes à partir de leurs observations sur les oiseaux.
L’auteur
parle souvent au conditionnel («... il se pourrait que...»), et il ne va pas jusqu’à dire que ce que font les oiseaux est identique à ce que font
les humains – donc il ménage notre «dignité»! Mais il est honnête et
expose sa vision en introduction: «Plus nous étudions les oiseaux et leurs
comportements, plus nous leur trouvons des similitudes avec l’espèce humaine.
Dans pratiquement tous les domaines de l’éthologie des oiseaux – la reproduction,
les populations, les déplacements, les rythmes quotidiens, la communication, la
navigation, l’intelligence, etc. – des parallèles, aussi nombreux que
significatifs, apparaissent. Depuis peu, l’approche scientifique du
comportement animal nous engage à moins nous focaliser sur le caractère
exceptionnel des humains pour davantage privilégier ce que l’animal humain
partage avec d’autres animaux (…). Depuis quelque temps, l’écart perçu entre
l’homme et les autres espèces animales ne cesse de se réduire de part et
d’autre». Bon, j’aurais aimé que le livre se termine avec un chapitre de
conclusion qui ramasse les informations et ose pousser la réflexion plus loin, quitte
à aller trop loin! Par contre, je dois reconnaître que le dernier chapitre, sur
l’Albatros, peut être comme un beau et troublant finale de symphonie.
Le
livre fait ressortir des traits communs entre des oiseaux et nous. Je ne veux
pas trop en dire ici, afin que vous gardiez la surprise à la lecture. J’en
mentionne juste deux.
Le
Colibri vit à 100 milles à l’heure, et son cœur bat à 1200 battements par
minutes! La principale cause naturelle de mortalité serait la crise cardiaque…
Or, les humains vivent «rapidement» dans les villes modernes. Selon une étude,
les piétons des grandes villes marchaient en moyenne à 1,32 mètre par seconde
il y a 10 ans, et maintenant à 1,41 mètre par seconde. Horaire chargés et
serrés, fast-food, etc., les maladies cardiaques sont une des principales
causes, sinon la principale cause de mortalité dans ces environnements. Tiens
donc.
Chez
les Mérions, des oiseaux adultes sont des «nounous» : ils gardent les
jeunes qui ne sont pas les leurs! C’est un exemple de comportements collaboratifs
chez les oiseaux.
La
comparaison entre les humains et les oiseaux est attrayante…, mais elle est
aussi inégalitaire! En fait, on compare une seule espèce, l’être humain, avec
quelques 10 400 différentes espèces d’oiseaux! Telle espèce d’oiseau possède
une capacité exceptionnelle dans tel domaine, qui peut être effectivement largement
supérieure à celle des humains dans le même domaine; mais aucune espèce
d’oiseau ne cumule toutes les capacités mentionnées dans le livre. Si un Super
Oiseau parvenait à les cumuler, là, nous serions déclassés. J’avoue rêver qu’un
oiseau réussisse un jour cet exploit – je pense que les humains se sentiraient
«menacés» et pourraient trouver des raisons de faire la chasse à un tel oiseau.
Il vaudrait mieux pour lui de vivre dans la discrétion pour un temps…
Poète
persan et mystique soufi, Farîd al-Dîn ‘Attar avait imaginé quelque chose du
genre au XIIe siècle dans son roman allégorique Le langage des oiseaux (ou La
conférence des oiseaux). du 12e siècle. Dans ce roman, les oiseaux
mènent une quête pour rencontrer l’Oiseau-Roi Simorg. Après plein d’aventures,
ils découvrent que ce Roi était eux-mêmes réunis : un Super Oiseau. J'avais un peu parlé de ce livre dans mon article précédent.
L'intelligence des oiseaux
Autre livre paru en 2017. Serait-on jaloux des Corbeaux? |
Par
contre, il est clair que l’intelligence des oiseaux a été grandement
sous-évaluée, y compris par la science : «cervelle d’oiseau», «tête de
linotte»… C’est que le cerveau des oiseaux est structuré d’une manière bien
différente de celui des mammifères. Mais cette différence n’implique aucune
infériorité. Le chapitre sur la Pie bavarde montre que des espèces d’oiseaux
sont franchement plus intelligentes que bien des espèces de mammifères, et que
certains oiseaux comptent parmi les animaux les plus intelligents. En certains
pays, on fait la chasse aux Corvidés pour toutes sortes de mauvaises raisons
qui cachent, à mon avis, la crainte face à des oiseaux intelligents, comme une
jalousie aussi. C’est inacceptable. Au début de 2018, les autorités d’un
village français ont abattu une quinzaine de Corbeaux. Quel crime avaient-ils
commis? On dit qu’ils faisaient du bruit! Ma foi, nous donnera-t-on le droit de
tirer sur ces motocyclistes qui pétaradent dans les rues, sur les gens
incapables de parler sans crier, sur ceux qui mettent leur musique à plein
volume, ou encore le droit de détruire les usines qui font un bruit incessant?!
Les oiseaux pensent que les humains sont bien hypocrites!
La Pie bavarde, par Wilhelm von Wright (1810-87) |
Le
sujet de l’intelligence des oiseaux est d’ailleurs dans l’air! Avant le livre
de Noah Strycker, deux autres livres sont parus en 2017 abordant ce
sujet :
Jennifer
Ackerman : Le génie des oiseaux. Marabout Sciences et Nature
Nathan
Emery : L’étonnante intelligence des oiseaux. Éditions Quae. Avec de
superbes illustrations et une vulgarisation scientifique plus approfondie. Il
est aussi un peu plus cher.
Pourtant,
on n’en sait pas beaucoup à ce jour sur l’intelligence des oiseaux, car peu
d’espèces ont été testées. Outre les Perroquets et les Corvidés, des espèces de
trois autres groupes d’oiseaux seraient néanmoins candidates au titre d’animaux
particulièrement intelligents : les Pics, les Calaos, les Faucons. À
suivre. Mais voici que la science s'intéresse aussi à l'intelligence... des plantes!
Les émotions des Oiseaux
«Les plantes??? Et quoi encore?!» |
On parle ainsi de plus en plus de culture animale. À cet effet, chez les oiseaux, une partie du chant est innée, mais une autre doit effectivement être apprise par le jeune qui lui est donc transmise par le parent. Les darwinistes purs et durs soutiennent que les émotions humaines sont essentiellement les mêmes que celles des animaux. Cette idée reste choquante parce que nous aimerions que nos émotions à nous soient supérieures, comme le reste! Il parait d’ailleurs que le rôle de l’art est d’exprimer nos émotions. Mais à mes yeux, personne n’a besoin de l’art pour exprimer ses émotions et, d’ailleurs, les émotions des artistes ne sont pas non plus «supérieures» à celles des autres personnes. Il me semble que l’accent est trop souvent mis sur l’émotion dans l’art…
Le fidèle Albatros |
Frankenscience!
Nuée d'Étourneaux |
Mais
l’histoire des sciences n’est pas toujours à notre honneur! Le livre relate
plusieurs expériences où les oiseaux sont maltraités et carrément mutilés de
manière permanente. Par exemple, un chercheur a crevé les yeux d’Urubus pour
déterminer si l’oiseau trouve les cadavres d’animaux à l’odeur ou à la vue –
ses Urubus en sont morts rapidement. Cela se passait au XIXe siècle,
et on pourrait croire que ces horreurs ne se font plus. Mais le livre relate
des expériences de même genre beaucoup plus récentes. Par exemple, des
chercheurs ont pris deux groupes de Pigeons pour enquêter sur les aptitudes
exceptionnelles de cet oiseau à s’orienter dans l’espace. Ils ont sectionné le
nerf trijumeau à un groupe – nerf associé à la perception du magnétisme; et ils
ont coupé le nerf olfactif (odorat) à l’autre groupe; les pigeons du premier
groupe ont retrouvé leur chemin alors que ceux du deuxième groupe se sont
perdus… et nul ne s’est soucié de ce qui leur était arrivé.
Boris Karloff incarne le monstre du docteur Frankenstein |
Voilà
de la «Frankenscience»! Oui, digne du docteur Frankenstein. https://fr.wikipedia.org/wiki/Frankenstein_ou_le_Prom%C3%A9th%C3%A9e_moderne
De la science qui
abuse de son pouvoir sans aucune véritable justification et sans éthique non
plus. De la science à l’image de notre désir de domination, à l’image de nos
prétentions : «Un oiseau n’est pas une personne. Moi j’en suis une. Cela
me donne le droit de les chasser, de les tuer, de les mutiler. Je suis le plus
fort, niarniarniar!». Notre domination s’est bâtie sur la frankenscience, et
elle demeure fondée sur elle. Une science et une idéologie qui cause la plus
grande extinction depuis celle des dinosaures il y a 65 millions d’années, et
qui est en train de semer la désolation partout. Aurions-nous pu faire
autrement? Si oui, le voudrions-nous vraiment? Je ne sais pas si nous
changerons les choses avant de pâtir nous-mêmes de la chute massive de la
biodiversité sur Terre (et dans les océans). Mais des livres comme celui-ci
peuvent apporter une petite contribution en ce sens.
https://www.ledevoir.com/societe/environnement/516917/les-zones-mortes-prennent-de-l-ampleur-dans-les-oceans
Je termine mon article avec un point secondaire où la science se comporte à nouveau drôlement face aux oiseaux. Depuis longtemps, les ornithologues distinguent entre les chants et les cris. Grosso modo, les chants sont complexes, et les cris sont brefs et simples. Par convention, seuls les oiseaux de l'ordre des Passériformes sont considérés comme pouvant chanter. Dans mon livre Le chant des oyseaulx, je rapporte cette
distinction traditionnelle entre «chants» et «cris» (page 37).
Personnellement, je ne tiens pas à cette distinction, et je préfère
parler plutôt du langage d'une espèce, avec son répertoire de musimots
et musiphrases. Car la réalité est plus nuancée. Reste qu'il est quand même curieux d'introduire un critère esthétique et subjectif, relatif au goût, pour distinguer des vocalisations d'oiseaux.
Ce surnom d'«oiseaux chanteurs»
est resté accolé aux Passériformes au point que l'on a glissé jusqu'à
considérer qu'eux seuls chantent, et considérer dans le même mouvement
que les autres oiseaux ne chantent pas mais crient. On a transformé un
simple surnom en convention, voire même en «fait» scientifique.
Pourtant, tous les Passériformes ne sont pas de grands chanteurs! Par
exemple, les Moucherolles possèdent un chant si limité, du moins aux
oreilles humaines, que leur onomatopée a suffit pour nommer l'espèce:
Moucherolle phébi, Moucherolle tchébec... Cela n'annonce
pas de grandes symphonies! On dit du Moineau, pourtant un Passériforme,
qu'il pépie et non ne chante. Les Corneilles sont aussi des
Passériformes: leur chant (si «chant» il y a) est-il si «mélodieux»?
Cris et chants: quels oiseaux chantent?
Pioui de l'Est, par John Conrad (libre de droits) |
Historiquement, cette distinction entre
«chants» et «cris» vient du fait que l'on a surnommé les Passériformes,
l'ordre d'oiseaux qui contient plus de la moitié des espèces, «oiseaux
chanteurs» ou, en anglais, «songbirds». Pourquoi ce surnom? Tout
simplement parce qu'on trouvait leurs chants plus «mélodieux» et
«musicaux» que ceux des autres oiseaux - on ne connaissait pas le Rap à
cette époque! Mais on a tout autant surnommé les Passériformes «oiseaux
percheurs», ou «Perching Birds» en anglais, et le mot «passériforme» ne se réfère d'ailleurs pas à
l'aptitude pour le chant.
Guêpier, par John Gould (1837) |
Le «chant» se distinguerait par son aspect plus élaboré.
Le Plongeon huard signale sa présence et son territoire par un «cri»
(parce qu'il n'est pas un Passériforme!): ce dit cri est fondé sur trois
notes dans un ambitus large. En comparaison, la Mésange à tête noire se
signale par un «chant» (parce qu'elle est un Passériforme!), mais ce
chant n'est que sur deux notes et dans un ambitus très restreint.
Autrement dit, le «cri» du Huart est plus élaboré que le «chant» de la
Mésange. Chez cette dernière, son «cri» est lui-même plus complexe que
son «chant».
Si
Barklow, spécialiste de cet oiseau, parle effectivement de «cris» pour le Plongeon huard, il nomme
l'un d'eux «yodel». Or, «yodel» est bel et bien un terme musical
désignant une technique de chant!
Le Guêpier d'Europe n'est pas un Passériformes: il ne «chanterait» donc pas. Pourtant, ses vocalisations sont plus complexes que celles de plusieurs Passériformes, plus «mélodieuses» aussi. Aucune raison logique ne devrait donc empêcher de dire qu'il chante. https://fr.wikipedia.org/wiki/Gu%C3%AApier_d%27Europe
Je pourrais multiplier les exemples.
Il est peu probable que les oiseaux eux-mêmes distinguent entre chants
et cris: pour eux, ce sont des éléments de leur langue, des éléments
d'un seul et même langage, principalement produits grâce à un organe spécifique. Que l'on parle, selon les écoles de
pensée, de «cris et chants» ou de «vocalisations» ou encore de
«musilangage», la quasi totalité des espèces d'oiseaux communiquent par
le son. Un musicien pourra ainsi utiliser le mot «chant» pour désigner
l'ensemble de ces communications, sans pour autant avoir tort de son
point de vue. C'est d'ailleurs fort probablement ce qui s'est passé pour que l'on associe le chant aux seuls Passériformes!
Sources des illustrations: Sites commerciaux (pour les couvertures de livres) et Wikipédia (Domaine public, PD-US)