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lundi 1 mars 2021

BOURRASQUE. Pour flûte seule (opus 16)

Bourrasque. Pour flûte seule (opus 16)

Pour écouter Bourrasquehttps://www.youtube.com/watch?v=8c07cOz0LUM

 

Bourrasque est éditée chez Henry Lemoine (Paris)
Dans Bourrasque, la flûte incarne les humeurs du vent : le vent tantôt tourbillonnant, rageur et moqueur; le vent tantôt léger, frais, mélodieux. D’une durée d’environ 12 minutes, l’œuvre enchaîne des sections variées menant à une virevoltante danse finale! La flûte étant l’instrument de musique le plus proche du souffle, celui-ci est mis en valeur dans des notes «soufflées», «roulées», «parlées», et dans des moments où le souffle se transforme en note et vice-versa.

Achevée en juillet 1991, Bourrasque fut créée en octobre de la même année, par Paola Secco. Petit miracle : un fort vent d’automne a fait entendre ses hurlements jusque dans la salle de concert, en parfait dialogue avec cette musique inspirée de lui. Paola Secco a enregistré l’œuvre peu après. En 1997, les Éditions Henry Lemoine de Paris ont publié la partition, dans la collection Les contemporains.

Bourrasque est une fantaisie sur quatre notes : La, Sol, Mi, Ré, que l’on entend dès le tout début :

Les quatre notes du motif fondamental de Bourrasque

Bourrasque est une musique très arborescente. De ce petit fragment de quatre notes naissent toutes sortes de transformations et de péripéties : renversements, rétrogradations, expansion des intervalles, nuances modales, etc. 

 

Premières notes de Bourrasque / (c) 1991 Antoine Ouellette Socan

La pièce illustre mon principe de «tonalité aérienne» : une musique polarisée sans les tensions usuelles de la musique tonale; une musique même dans laquelle la tonique possède peu de poids et de gravité. Bourrasque se termine ainsi sur la note Do, une note qui ne fait pas partie du motif initial de quatre notes. 

La conclusion de Bourrasque / (c) 1991 Antoine Ouellette Socan

Vers le milieu de la pièce, il y avait cependant eu un passage centré sur Do, dans lequel cette note se transformait en souffle ou naissait du souffle. 

Note Do et souffle se transformant l'un en l'autre, dans Bourrasque / (c) 1991 Antoine Ouellette Socan

Je marche dans la tempête! Photo par Coralie Adato
Avant Bourrasque, j’avais composé pour un instrument mélodique seul : le violoncelle. Mais Bourrasque inaugurait une série de pièces pour un instrument à vent seul. Cette série contiendra des œuvres pour saxophone alto (Odyssée), basson (Musique sous les étoiles), trompette (Bouleau jaune), hautbois (Dent-de-lion), clarinette (Rivages), de même qu’une autre pièce pour flûte, plus méditative (Auberivière).

Ma musique montre une tendance monodique : ce fut l’étude du chant grégorien qui m’avait révélé cette tendance en moi et qui m’a poussé à l’assumer. Ma musique est ainsi, plus mélodique et rythmique qu’harmonique et contrapuntique – mais j’utilise aussi des accords (de manière plutôt «économique») et différentes formes de contrepoint (à l’occasion).

Le rythme est très varié dans Bourrasque. Il est tantôt métrique et basé sur des ostinatos, tantôt dégagé de toute pulsation – il est alors basé sur la durée de la respiration. Par commodité mais aussi par respect pour le vent qui souffle là où il veut, je n’ai mis aucune barre de mesure dans Bourrasque.

Sans nécessairement le vouloir, certaines de mes pièces viennent en paires, l’une étant comme un écho de l’autre. Peu après la composition de Bourrasque, j’ai commencé celle d’Une Messe pour le Vent qui souffle, pour orgue (opus 18). Dans la Messe, le Vent est abordé par ses attributs sacrés mais, dans Bourrasque, il s’agit du vent comme force de la nature selon une vision presque chamanique. Dans les deux cas, le vent est aussi le symbole de l’imagination et des mondes que l’on peut parcourir en déployant les ailes de notre esprit.